Les instants de beauté que nous font vivre un être, un paysage, un tableau, un livre, une voix, une symphonie, la rumeur d’un aéroplane… sont parmi les plus forts de nos existences. Mais que faire des impressions esthétiques ? Quel prolongement leur donner ? Faut-il même chercher à les prolonger ? Faut-il leur consacrer nos vies ? De quelle façon ? Plus généralement, quel est le bon rapport au beau ? Aucune époque de l’histoire de la littérature n’aura été plus habitée par cette question que celle des années 1870-1920. Et les romans de Wilde, Huysmans, Proust, D’Annunzio, Thomas Mann, etc. offrent, à travers discours et situations, des réponses d’une richesse inépuisable. Il s’agit ici de retrouver les termes du débat en faisant constamment dialoguer les oeuvres entre elles, comme si elles s’interrompaient les unes les autres pour se compléter, se corriger ou se contredire. Cet essai aura atteint son but s’il fait ressortir leur cohérence, s’il éclaire les positions défendues et leurs implications, s’il aide le lecteur à analyser voire à déterminer son propre rapport au beau. Qui sait ? Peut-être avons-nous encore quelque chose à apprendre, nous qui vivons à l’ère de la « consommation des biens et des services culturels », d’une littérature centenaire.