La parution de Belle du Seigneur en mai 68 constituait un double pavé dans la mare. Comment douter que la dénonciation, dans l’œuvre d’Albert Cohen, de tous les pouvoirs – sexuel, social, militaire et politique – s’accordât avec la sensibilité libertaire du moment ? Mais à l’heure où l’on célébrait la fin des antiques morales répressives, voici qu’un écrivain faisait l’apologie des interdits, proclamait la grandeur des commandements bibliques et vouait aux gémonies le « maudit amour des corps » ! Le destin de Solal et d’Ariane n’a pas fini de nous surprendre : comment un roman aussi ambitieux, iconoclaste, contradictoire et désespéré, a-t-il pu rencontrer le grand public au point de devenir le cadeau idéal des amoureux ?