La mort est généralement perçue comme une source inéluctable de malheur et de tristesse. Son évocation et ses représentations suscitent malaise et inquiétude, et on ne se confronte ordinairement à elle que par la force des choses. Cette grande inconnue, terrifiante et repoussante, demeure cependant un mystère qui éveille aussi la curiosité, jusqu’à engendrer certaines formes de fascination ou d’obsession. Mais est-il possible de se passionner pour la mort à l’excès, jusqu’à devenir accro ? Si une telle addiction n’existe pas pour la science, on peut toutefois s’interroger sur les formes qu’elle pourrait prendre et tenter de dresser le portrait de l’hypothétique thanatomane, pendant macabre de la figure fantasmée du toxicomane, qui s’adonnerait à la mort comme on s’adonne à une drogue. L’exercice revient à interroger les notions d’abus et de modération, car mettre en avant des penchants excessifs signale l’existence de normes à ne pas transgresser. Où situer alors les limites entre la curiosité, la passion excentrique, et l’addiction pathologique ? Sous quelles formes celle-ci pourrait-elle se manifester ? Et quelles menaces ferait-elle encourir au thanatomane, et à la société ?